Exposition Alexandrie : futurs antérieurs


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Affiche et visuels de l'exposition

Affiche Alexandrie

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Visuels


Hrair Sarkissian
1. Hrair Sarkissian, Background, 2013. C-print (papier
rétro-éclairé). Courtoisie de l’artiste © Hrair Sarkissian
 
Alexandre le Grand détail
2. Statue équestre d’Alexandre le Grand (détail),
IIIe-IIe siècle av. J.-C. Bronze. Genève, Fondation
Gandur pour l’art © Fondation Gandur pour l’Art,
Genève ; photo : André Longchamp
 
​​Asli Cavusoglu
3. Aslı Çavuşoğlu, Gordian Knot, 2013. Céramique
© Aslı Çavuşoğlu. Courtoisie Isabella & Mehmet
Içöz, photo : Hadiye Cangökçe
 

Jasmina Metwaly Gorgon
4. Jasmina Metwaly, travail préparatoire pour
Gorgon-avtr, 2022. Vidéo et triptyque : huile
sur bois et technologie digitale © Courtoisie
de Nurah Farahat, Alaa Abdullatif et Jasmina
Metwaly


Maha Maamoun Domestic Tourism Beach
5. Maha Maamoun, Domestic Tourism I : Beach,
2005. C-print © Courtoisie de l’artiste et
Gypsum Galerie
 
Jumana Manna Master Water
6. Jumana Manna, Master, "Water-Arm Series",
2019. Céramique, briques, colliers de serrage
© Jumana Manna. Image courtoisie de l’artiste
et Hollybush Gardens, Londres. Photo : Louis
Haugh


Marianne Fahmy History
7. Marianne Fahmy, History as proposed, 2016.
Magazine et impressions numériques.
Courtoisie de l’artiste © Marianne Fahmy


Bague cartouche
8. Titulature latine de l’empereur traduite en
grec et inscrite en hiéroglyphes égyptiens.
Milieu du IIe siècle apr. J.-C. Or massif.
Amsterdam, Allard Pierson, Université
d’Amsterdam © Allard Pierson, Université
d’Amsterdam
 

Monnaie avers
9a. Tétradrachme « dynastique », souverains
divinisés, avers : bustes de Ptolémée II et
d’Arsinoé II (image 9a), IIIe siècle av. J.-C.
Or. Morlanwelz, Musée royal de Mariemont
© Musée royal de Mariemont



Monnaie revers
9b. Tétradrachme « dynastique », souverains
divinisés, revers : bustes de Ptolémée Ier et
de Bérénice Ire, IIIe siècle av. J.-C. Or.
Morlanwelz, Musée royal de Mariemont
© Musée royal de Mariemont



Tête colossale statue royale
10. Tête colossale d'une statue royale,
305-222 av. J.-C. Chaux de nummulite,
à gros grains. Kunsthistorisches Museum
Vienna, Egyptian and Near Eastern
Collection © KHM-Museumsverband
 
Relief Rijksmuseum
11a. Relief de Ptolémée Ier, 304-30 av. J.-C.
alcaire. Leyde, Rijksmuseum van Oudheden
© National Museum of Antiquities, Leiden

 

Détail relief Rijksmuseum
11b. Relief de Ptolémée Ier (détail),
304-30 av. J.-C. Calcaire. Leyde,
Rijksmuseum van Oudheden
© National Museum of Antiquities, Leiden
 
Iman Issa Material sculpture
12. Iman Issa, Material for a sculpture
representing a bygone era of luxury
and decadence
, 2012. Sculpture en
laiton, socle en bois, texte vinyle
© Iman Issa, Courtoisie de l’artiste
et Rodeo, Londres / Piraeus, photo :
Stuart Whipps
 
Haig Aivazian Rome
13. Haig Aivazian, Rome is not in Rome
– Stadion
, 2016. Fer forgé et cuir
rembourré © Haig Aivazian. Courtoisie
Marrakech Biennale, photo : Jens Martin


Horus légionnaire
14. Horus légionnaire, 30 av. J.-C.-395
apr. J.-C. Alliage cuivreux. Paris, Musée
du Louvre, Département des Antiquités
égyptiennes © Musée du Louvre, Dist.
RMN-Grand Palais / Christian Décamps


Stele Hildesheim
15. Relief avec signe ânkh dans lequel
est intégrée une croix chrétienne, Ve-VIe
siècle apr. J.-C. Calcaire. Hildesheim,
Roemer-und Pelizaeus-Museum
© Roemer-und Pelizaeus-Museum,
photo : Sh. Shalchi


Mona Marzouk Apparatus
16. Mona Marzouk, Apparatus and Form,
2022. Création numérique © Mona Marzouk,
Courtoisie de l'artiste et Gypsum Galerie


Bracelet Cobra
17. Bracelet au cobra, IVe siècle apr. J.-C. Or.
Morlanwelz, Musée royal de Mariemont
© Musée royal de Mariemont


Vase Alexandrie
18. Jarre aux motifs de sphinx, de Bès et d’oeil
oudjat
, IVe-Ier siècle av. J.-C. Faïence verte et
bleue. Genève, Fondation Gandur pour l’art
© Fondation Gandur pour l’Art, Genève ;
photo : Grégory Maillot
 
Ahmed Ghoneimy Bahari
19. Ahmed Ghoneimy, Bahari, 2011. Capture de
la vidéo. Courtoisie de l’artiste © Ahmed Ghoneimy


Fresque Naples
20. Io accueillie par Isis à Canope, Ier siècle
apr. J.-C. Fresque. Naples, Museo archeologico
nazionale di Napoli © Alamy Stock Photo


Céline Condorelli White Gold
21. Céline Condorelli, White Gold, 2012 (vue
de l’exposition à Lunds Konsthall, Suède). Textile
© Céline Condorelli, photo : Terje Östling
 
Hassan Khan The Twist
22. Hassan Khan, The Twist, 2013 (vue de
l’exposition “Unrest of Form. Imagining
the Political Subject”, Secession, Vienne,
Autriche, 2013). Acier inoxydable. Courtoisie
de l’artiste © Hassan Khan. Courtoisie
Galerie Chantal Crousel, photo : Oliver
Ottenschlaeger


Wael Shawky Isles the Blessed
23. Wael Shawky, Isles of the Blessed
(Oops!...I forgot Europe)
, 2022. Film -
15 minutes 41 secondes © Wael Shawky,
Courtoisie Lisson Galerie
Scénographie

Plan de scénographie

Dossier enseignant

Dossier pédagogique de l'exposition

Cartels

Cartels simples

Cartels développés

Textes expographiques

Entretien avec Arnaud Quertinmont, Edwin Nasr et Sarah Rifky, commissaires de l’exposition

 

Mucem

(M.)

Cette exposition dresse un portrait d’Alexandrie à travers archéologie et création contemporaine. Pourquoi un tel choix s’imposait-il, pour une telle ville ? 

Arnaud Quertinmont

Il était important de créer des ponts entre l’Antiquité et l’époque contemporaine en montrant notamment comment certaines problématiques vécues par les Alexandrins du passé trouvent encore un écho aujourd’hui. C’est particulièrement le cas pour la problématique de l’eau ou encore pour l’incapacité à illustrer certains aspects de la vie quotidienne des habitants. Il était également fondamental de donner la parole à des artistes égyptiens pour qu’ils puissent donner leur propre vision de la ville et de la construction de certains mythes l’entourant.

Edwin Nasr et Sarah Rifky.

L’objectif de cette exposition est de nous inviter à puiser dans l’histoire, la mythologie et les réalités d’Alexandrie pour aider à une meilleure compréhension de l’Europe et de ses histoires fondatrices. Il était donc essentiel d’aborder simultanément l’archéologie et le contemporain. Comment envisager le temps archéologique au présent ? Existe-t-il des mécanismes qui peuvent permettre à ce projet essentiellement européen de s’adapter au temps postcolonial ? En pensant Alexandrie comme un lieu, et non comme une idée, nous nous sommes demandé comment, le cas échéant, une exposition à Bruxelles ou à Marseille pourrait représenter Alexandrie pour son public. Qui fait le travail d’imagination et qui est ce public ? Ces questions ont constitué le point de départ de notre travail de conservation et de recherche.

 

M.

De quelle manière les mythes et les légendes de l’Alexandrie antique influent-ils encore sur l’imaginaire de l’Alexandrie d’aujourd’hui ?

A.Q. 

Alexandrie reste une ville mythique dans l’imaginaire collectif. Mais cet aspect se limite malheureusement à la seule Antiquité. En effet, la ville a perduré bien après le IVe siècle de notre ère et jusqu’à aujourd’hui. Parler d’Alexandrie, c’est évoquer des monuments emblématiques tels le Phare, la Bibliothèque, le Mouseion ; mais également des dirigeants célèbres comme Cléopâtre. Ces bâtiments, tout comme ces dirigeants, survivent aujourd’hui dans notre imaginaire auréolés de mythes et de légendes. Il était important pour nous de revenir aux fondements archéologiques, loin de toute forme de romantisme.

E.N. et S.R.

Comme d’autres villes de la Méditerranée orientale, Alexandrie a été façonnée par les tensions historiques et les récits contestés des forces impériales et émancipatrices. Lorsque le Roman d’Alexandre paraît dans sa traduction latine en 338 après J.-C., sa véracité importe peu. L’Historia Alexandri Magni originale remonte au IIIe siècle, elle raconte des événements réels et imaginaires de la vie d’Alexandre le Grand. C’est une œuvre élaborée, construite autour d’une base historique enrobée de « romance » ; un tissage de récits et de légendes fantastiques. Peu de temps après l’apparition des éditions latine et grecque, le Roman d’Alexandre a été traduit en neuf langues ainsi que dans la plupart des langues vernaculaires européennes médiévales. Même si elle est presque entièrement fictive, l’œuvre est devenue un incontournable dans l’Europe des Lumières en plein essor ; elle a inauguré une nouvelle époque de commerce et de colonialisme. Elle était au cœur de l’imaginaire européen, dans un cliché orientaliste toujours d’actualité. La ville d’Alexandrie devient cruciale pour l’Europe du XIXe siècle quand elle devient le quatrième port de Méditerranée. Ce qui est vrai pour l’Alexandrie d’alors l’est aussi pour d’autres villes portuaires de cette époque et même d’aujourd’hui.

 

M.

Comment allez-vous faire revivre l’Alexandrie de l’Antiquité dans l’exposition ?

A.Q.

Il est malheureusement difficile de présenter ce qu’était l’Alexandrie antique, notamment en raison d’un tsunami qui a ravagé les côtes et le centre-ville au IVe siècle de notre ère. Pour tenter de faire « revivre » la cité, nous avons donc recours à des récits d’auteurs anciens mais également à des pièces de monnaie. Ces différentes sources nous offrent l’image d’une ville multiple teintée d’influences égyptienne, grecque ou proche-orientale. Grâce aux somptueuses aquarelles de Jean-Claude Golvin, nous pouvons tenter de nous immerger dans ce qu’était réellement la ville.

 

M.

Quelles sont les pièces archéologiques majeures présentées dans l’exposition ?

A.Q.

L’exposition a pu compter sur le soutien de nombreuses institutions publiques et privées qui ont accepté de nous confier certains de leurs trésors. Parmi ceux-ci, un camée conservé au Kunsthistorisches Museum de Vienne : il représente le triomphe naval d’Octave, futur Auguste, à Actium, sur les armées de Marc Antoine et Cléopâtre. Une bague en or au nom de l’empereur romain Antonin le Pieux, prêtée par l’Allard Pierson d’Amsterdam, est un objet tout à fait majeur. La titulature latine de cet empereur est traduite en grec et inscrite en hiéroglyphes égyptiens, comme reflet du cosmopolitisme alexandrin. Des mains colossales, provenant du Musée royal de Mariemont, nous emmènent par le biais d’un film animé dans la cité d’Alexandrie, à la découverte de statues colossales – dont une autre tête provenant de Vienne – qui ornaient autrefois la ville. Une série de stèles funéraires, conservées au musée du Louvre, nous permettent de rencontrer les Alexandrins (païens ou juifs) du passé et de parler à nouveau de ce cosmopolitisme si particulier à la cité.

 

M.

Comment s’est effectué le choix des artistes contemporains ?

E.N. et S.R.

L’exposition présente dix-sept artistes venant d’Égypte, mais aussi du Liban, de Turquie, des États-Unis et de Palestine, avec des œuvres produites entre 1987 et 2022. Trois de ces œuvres, celles des artistes Wael Shawky, Jasmina Metwaly et Mona Marzouk, ont été spécialement commandées pour l’exposition. Ces œuvres – peintures, photographies, sculptures, textes et vidéos – s’engagent avec la ville portuaire chimérique d’Alexandrie. Elles compliquent notre compréhension d’Alexandrie et dialoguent avec la ville. Que ce soit directement ou par association, elles sondent l’histoire, les mythes et la réalité d’Alexandrie ; peu à peu, elles ébranlent le romantisme d’Alexandrie, les récits coloniaux et les savoirs qui ont marqué la ville dans l’imaginaire européen passé ou peut-être latent. Nous imaginons Alexandrie comme une ville qui change de forme. Alors que la plupart des œuvres incluses ont été conçues en relation directe avec Alexandrie, il a parfois été nécessaire d’intégrer des œuvres sur le Liban (Haig Aivazian) ou la Palestine (Jumana Manna).

 

F.M.

Que pouvez-vous dire du regard des artistes sur cette ville ? Qu’est-ce qui revient le plus souvent ?

E.N. et S.R.

Les œuvres de l’exposition nous mènent vers des infrastructures en ruine, des ruminations diaristiques, des monuments fantastiques, des fouilles archéologiques, des vestiges matériels de l’industrie du tourisme et des récits oubliés d’un passé lointain pour souligner l’inconnaissabilité et la spéculation comme modes de relation et de navigation dans les villes réelles et imaginaires. Dans l’exposition, nous travaillons avec des artistes et des œuvres qui déploient des images et des objets jetant des ombres de doute sur la véracité de l’histoire. Chacune des œuvres sélectionnées cherche à défier, explorer, intensifier, diminuer ou nier les évidences et les attentes. L’œuvre d’art s’engage ici dans les tâches nécessaires de la pensée historique. En étudiant les archives de la vie quotidienne à Alexandrie au cours du siècle dernier, l’artiste Céline Condorelli s’est retrouvée hantée par l’idée qu’il ne restait plus rien ; elle disait : « Il n’y a plus rien. » En travaillant à partir de notre propre doute curatorial, nous avons nous aussi beaucoup appris grâce à ces œuvres. Elles aident à mieux comprendre le projet dans sa globalité.

 

M.

Quelles correspondances voyez-vous entre Alexandrie et Marseille ?

E.N. et S.R.

Comme nous l’avons dit plus haut, ce qui est vrai d’Alexandrie peut également l’être pour d’autres villes portuaires d’aujourd’hui. L’opportunité de penser avec des objets archéologiques et des œuvres en prise avec des histoires effacées nous permet de nous interroger sur les différentes expériences civilisationnelles qui ont défié l’histoire à travers la Méditerranée, depuis Alexandrie et Beyrouth jusqu’à Marseille et Gênes.