Arts du spectacle
Les collections relatives aux arts du spectacle sont vastes, et font partie des collections constituées dès l’origine du musée. La toute première pièce acquise par le musée (en 1881!) est d’ailleurs un tambour. Ces collections, riches de près de 35 000 pièces, portent sur les domaines les plus divers: arts forains, cirque, danse, marionnettes et automates, musique et chanson, et tauromachie.
- Automate flûtiste
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Au siècle de la révolution industrielle la technologie des automates est maîtrisée principalement par les artisans français. Alexandre-Nicolas Théroude, le créateur de cette pièce pour laquelle il a déposé un brevet en 1866, est connu pour avoir le premier su enfermer le mécanisme dans le corps de l'automate. S'inspirant du modèle en marbre du Faune jouant de la flûte exposé Louvre (ancienne collection Borghese, MR 187), l’enveloppe décorative de cet automate prend, pour satisfaire aux goûts exotiques de la clientèle de l'époque, l'aspect et la couleur des sujets de l'empire colonial, alors à son apogée. Il possède un orgue mécanique à cylindre dans la poitrine ; ses doigts montent et descendent sur l’instrument en synchronisation avec la musique, il salue de la tête, ses yeux considèrent le public, il cligne des paupières et sa bouche semble contrôler son souffle. Les dates de création des airs d’opérettes qu’il interprète indiquent que ce modèle a vraisemblablement été fabriqué immédiatement après 1878, date de l’Exposition Universelle de Paris. L’état de conservation exceptionnel de cette pièce permet que l’orgue mécanique fonctionne aujourd’hui encore avec l’ensemble de ses pièces d’origine, c’est-à-dire sans qu’aucune (mis à part les peaux des soufflets) n’ait eu à être remplacée.
- Automate de voyance
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Cet automate, qui disait votre avenir par les tarots pour 2 Frs, fait partie des automates et roulettes que l’on trouvait au début du XXe siècle dans à peu près toutes les foires et fêtes foraines, mais aussi dans quelques cafés de quartier. Son mécanisme est probablement celui d’une machine à sous mécanique faisant loterie reconvertie en machine de voyance. L’entreprise Bussoz, qui a réalisé cet automate, était spécialisée dans les jeux automatiques, et était également connue pour ses baby-foot, ses flippers, ses juke-boxes et autres jeux mécaniques installés dans les cafés populaires.
- Toile peinte de cinéma
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Toile peinte publicitaire destinée à une devanture de cinéma pour le film Le capitaine Fracasse, interprété par Jean Marais, Philippe Noiret, Louis de Funès et Sacha Pitoëff et réalisé par Pierre Gaspard-Huit en 1961. La composition figurative de cette toile est partagée entre le titre en rouge et le personnage du capitaine Fracasse habillé en bleu. Cette asymétrie se retrouve inversée dans le graphisme : à la sèche géométrie du titre répond le réalisme et le mouvement du personnage qui illustre bien son caractère romanesque. Le style, à la fois dépouillé et baroque de cette affiche n'en font qu'un exemple remarquable parmi la grande production de l'entreprise Publidécor. Il est intéressant de noter que cette toile est un réemploi : sous l’œuvre de surface on peut encore distinguer une partie de la toile peinte du film Le Bossu (dont rôle-titre est également interprété par Jean Marais), qui a été recousue ici. Des retouches de peinture ont été faites pour modifier l'apparence du Bossu (la bosse sur l'épaule gauche est ainsi masquée par la reprise de la peinture) pour lui donner les traits physiques du capitaine Fracasse.
- Manteau de clown
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La Maison Vicaire, installée à Paris, est mondialement connue pour avoir produit de 1929 à 1993 toutes sortes de costumes et de décors de spectacles. Au sein de l’entreprise fondée par ses parents, Gérard Vicaire (1927-1993) a consacré sa vie à réaliser de très remarquables habits de lumière qui ont habillé des clowns blancs dans le monde entier. Ce manteau a été réalisé sur mesure pour Bruno Stutz, le clown blanc du duo suisse The Chicky’s. Les costumes Vicaire étant d’un prix élevé, il n’était pas rare que, après avoir été dessiné et réalisé sur mesure, ils soient revendus pour être réutilisés par d’autres artistes. Bruno Stutz, ayant signé des contrats pour dix ans, avait l’obligation contractuelle de ne pas se présenter chaque année avec la même tenue, et devait donc renouveler sa garde-robe. Après avoir travaillé une saison avec ce manteau, il a fait alors savoir qu’il souhaitait le vendre. Gilles Février, qui pensait quitter la profession de ventriloque pour celle de clown blanc, cherchait un manteau et celui-ci était à sa taille. Il l’a porté durant une courte période, pour réaliser un numéro de verres musicaux, avant de reprendre son métier de ventriloque.
- Char de parade de cirque
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Elaboré par André Chéreau, constructeur renommé de manèges et de chars forains, ce char fait partie des nombreuses pièces uniques qu’il réalisa sur commande pour les tournées des principaux cirques français (Pinder, Bouglione, Amar, etc.) et des fêtes foraines. Ce char était utilisé lors des parades de rue, pour annoncer l’arrivée du cirque en ville et le programme du spectacle. Construit sur la base d’un châssis de camion, ce char est un véritable chef-d’œuvre de carrosserie, réalisé en tôle peinte et clouée sur une armature en bois en forme de dragon. Une tribune est installée à l’arrière du char pour accueillir un orchestre de dix personnes, cependant que le conducteur est dissimulé dans la tête du dragon.
- Marionnette de Charlemagne
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Le théâtre de marionnettes, Opera dei Pupi en italien, est une forme théâtrale dont les principaux protagonistes sont des chevaliers du Moyen Âge, représentés par des marionnettes à tringles et à fils. Ces marionnettes sont pour la plupart en armure et possèdent un bouclier et une épée de métal. Elles étaient, et sont encore, réalisées par des sculpteurs locaux, parfois eux-mêmes marionnettistes. Elles racontent des histoires inspirées principalement de la littérature chevaleresque du Moyen Âge européen, centrées sur les paladins de France, les héros de Charlemagne et leurs combats contre les Maures. Cette forme théâtrale et son répertoire expriment et reflètent le sentiment d’appartenance et la conscience identitaire sicilienne, en même temps qu’ils témoignent des formes premières de l’identité européenne. L’UNESCO a inscrit l'Opera dei Pupi sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Le Mucem a acquis en 2015 auprès du Teatro Carlo Magno dirigé par M. Vincenzo Mancuso, marionnettiste à Palerme, l’ensemble de la distribution de La mort de Roland (fin du cycle carolingien) soit quarante et une marionnettes, ainsi que l’ensemble des décors et accessoires de ce spectacle.
- Dessin de Joséphine Baker
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Dans l’immédiat après première guerre mondiale, l’exotisme de l’empire colonial français était particulièrement en vogue, en même temps que le jazz nord-américain connaissait des débuts prometteurs en Europe, et à Paris en particulier. Le théâtre des Champs Élysées, qui avait présenté en 1923 le ballet La Création du Monde d’après l’Anthologie Nègre de Blaise Cendrars, développe (sur une idée du peintre Fernand Léger) le projet d’un spectacle entièrement interprété par des Noirs, à l’exemple de ce qui se fait déjà aux Etats-Unis avec un certain succès. Née à Saint-Louis (Missouri) en 1906, Joséphine Baker chante et danse très tôt dans les music-halls de Broadway. En 1925 la Revue Nègre est créée au Théâtre des Champs Élysées, et Joséphine Baker y joue en première partie. Le tout-Paris se presse à la première. Joséphine Baker, dont la gloire sera planétaire, prend en 1937 la nationalité française. Femme engagée, elle participe à la Résistance durant la seconde guerre mondiale, et s’engage dans la lutte pour les droits civiques des Noirs.
L’affiche de la Revue Nègre a été réalisée par le peintre et affichiste Paul Colin, qui est devenu l’ami de Joséphine Baker. En 1929, celui-ci publie sous le titre Le Tumulte noir une série de lithographies en couleur, en hommage à la « folie noire » qui s’était emparée de Paris avec l’apparition du jazz, et du charleston, et du fait surtout de l’incroyable personnalité de Joséphine Baker. Ce dessin est celui qui orne la couverture du Tumulte noir.
- Cinematic 50
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Les Cinematic 50 étaient des projecteurs de film super 8 mm sonore, ayant la particularité d’être équipée de cinquante bobines de film super 8 mm sonores. Dans le même esprit que les Scopitones, ceux-ci étaient des jukebox qui, en plus de diffuser de la musique, présentaient de courts films, ancêtres des clips contemporains. Ces machines que l’on activait le plus souvent avec des pièces, étaient installées dans les cafés de la fin des années 1950 jusqu’au milieu des années 1960. Certain, comme celui-ci, ont intégré des chansons jusqu’à la fin des années 1970. Ce scopitone contient les succès des artistes en vogue en France ces années-là : Claude François, Village People, Dalida, Cerrone, Dick Rivers, Sheila, etc.
- Orgue forain
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Orgue mécanique monumental de cent quinze / cent dix-huit touches fabriqué en 1895 en Italie. Cet orgue a été réalisé par Charles Marenghi, ancien contremaître et héritier de la firme Gavioli. Cette maison, fondée en 1806 à Modène (Italie) par Giacomo Gavioli est mondialement connue pour avoir su porter à son meilleur niveau la réalisation d’orgues forains. Vers 1920, Gaudin, un ancien contremaître de Marenghi, transforme cet orgue. Cet instrument, capable de produire un son particulièrement puissant, est alors installé dans les fêtes foraines au pied des montagnes russes circulaires à vapeur, pour mieux attirer les passants. Il possède mille quarante tuyaux actionnés par un système pneumatique, cent cinq touches, cent-vingt-trois registres, trente-deux notes pour le chant (mélodie), vingt-cinq notes de contre-chant, douze notes d'accompagnement plus douze notes pour les basses. Il est entièrement chromatique et possède une étendue totale d'environ cinq octaves, ce qui autorise toutes sortes de restitutions, d'adaptations et de créations musicales. Les effets produits sont ceux de la contrebasse, la basse acoustique, le bombardon, le trombone, le cor anglais, le trombone à coulisse, le saxophone, le saxophone soprano, le saxophone ténor, le violoncelle, le cornet à pistons, le 1er et 2e violons, la viole de gambe, le violon alto, la grande flûte, le baryton, le cor d'harmonie, le basson, la clarinette, la petite clarinette, le hautbois, la musette, le bugle, la petite flûte, le flageolet, la flûte de pan, le piccolo, la caisse roulante, la timbale d'orchestre, la grosse caisse, la cymbale et la castagnette.
- Polichinelle
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Polichinelle est un des personnages centraux de la commedia dell’arte, où le personnage de Pulcinella participait à des intrigues amoureuses contrariées en y tenant le rôle du valet, bouffon autorisé à exprimer, y compris dans l’excès, ce que chacun souhaiterait cacher aux autres. Bossu, presque difforme, Pulcinella est un Napolitain, dont les paroles sont souvent difficiles à comprendre. Pour déformer la voix du personnage, les marionnettistes plaçaient sous leur langue une lame de métal ou de bois : la « pratique » (pivetta en italien). Le nom même de Pulcinella signifie « petit poussin », en référence au nez en forme de bec qui est le sien, et à sa voix nasillarde. Secondant Arlequin dans ses mauvais coups, il est paresseux et vulgaire, mais cependant rusé. Toujours armé d’un bâton, il est un personnage redouté qui n’hésite jamais à répondre violemment à l'autorité.
Dès le milieu du XVIe siècle, la commedia dell'arte arrive en France où elle rencontre le succès auprès des cours et des foires. Au fil des siècles ces marionnettes s'assagissent, s'adaptent à un public plus enfantin dès le XIXe siècle. Le personnage de Polichinelle devient progressivement présentateur des spectacles de marionnettes pour enfants, notamment des histoires de Guignol. Cette marionnette a été créée entre 1981 et 1984 pour le théâtre de Chaillot, quand Antoine Vitez le dirigeait et qu'il avait repris le répertoire pour marionnettes dans son théâtre pour enfants.
- Dessin d’un numéro de cirque
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Marthe et Juliette Vesque ont consacré leur vie au cirque. Leur père, Julien Vesque, botaniste au Muséum national d’Histoire naturelle, avait su transmettre à ses deux filles sa passion pour le dessin. Leur fascination pour le monde du cirque a permis la constitution d’un fonds d’une exceptionnelle richesse. Leur collection personnelle se compose de près de seize mille dessins d’une extrême précision et d’un grand réalisme dans la retranscription des mouvements et des costumes. Ces dessins aquarellés s’accompagnent d’un très important fonds d’archives composé des recherches effectuées par les sœurs Vesque tout au long de leur vie sur l’ensemble des arts du spectacle, des fêtes populaires, mais aussi sur le monde du sport et de la culture physique. Ces archives comprennent notamment des carnets manuscrits dans lesquels Marthe et Juliette Vesque décrivaient en détails les numéros de cirque auxquels elles avaient assisté et qu’elles ont minutieusement dessinés.
- Guitare électrique
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Le Mucem conserve dans ses collections de très nombreux instruments de musique. La toute première pièce inscrite dans ses collections est d’ailleurs un tambour. Parmi les instruments les plus récents figure cette guitare électrique réalisée au tout début des années 1980 par le luthier français Vincent Berton. Extrêmement brillant et perfectionniste, Vincent Berton était connu pour l’excentricité des formes de ses instruments, parfaitement en phase avec l’esthétique de certains groupes et guitaristes des années 1970-1980. Jaloux du secret de fabrication et du son de ses micros, il les dissimulait en les intégrant à l'intérieur du corps même de l’instrument. Cette guitare épée est emblématique de ses réalisations, distribuées sous la marque VLine, et du certain esprit d’une époque du rock.
- Affiche de casino
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Maurice Chevalier (1888 – 1972), était un chanteur, également acteur, parmi les plus célèbres du music-hall français. Sa gloire s’est étendue jusqu’aux États-Unis, où il a connu une carrière à ce point brillante qu’elle lui a valu notamment un Oscar d’honneur (1959), mais également d’être nommé au Golden Globes et aux Grammy Awards. Cette peinture, réalisée par Charles Kieffer, Kif de son nom d’artiste (1902-1992), est le projet d’une d’affiche, éditée en lithographie, pour le spectacle de Maurice Chevalier au Casino de Paris en 1925.
Le Casino de Paris est l’un des plus illustres music-halls de la capitale. Léon Volterra, entrepreneur de spectacles qui dirigeait le parc d’attraction Luna Park, à la sortie de Paris, a créé en 1914, dans un bâtiment où était jusque-là installés une patinoire en même temps qu’un théâtre, un tout nouveau cinéma-music-hall afin d’y présenter des revues capables de concurrencer celles du Moulin Rouge. La scène du Casino de Paris accueille dès lors les premiers orchestres de jazz en France, et ses revues sont renommées dans toute l’Europe. Immédiatement après la fin de la première guerre mondiale, Léon Volterra monte une nouvelle revue, dont il confie la vedette à Mistinguett. Celle-ci est déjà célèbre, et se produit avec succès au Moulin Rouge et aux Folies Bergères. C’est d’ailleurs là qu’elle a rencontré Maurice Chevalier, avec qui elle a vécu une longue histoire d’amour qui l’a conduite à s’engager comme espionne pendant la guerre, au profit de la France.
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Chaquetilla, veste de torero -
Pour la corrida classique, dite « à pied », chaque équipe de toreros, ou cuadrilla, comprend un matador, trois banderilleros et deux picadors montés. Les toreros portent des habits de lumières (trajes de luces), ainsi nommés du fait qu’ils sont richement brodés de cannetille d’or, d’argent ou de laiton. Les habits de lumières sont des costumes d’apparat en même temps que les habits distinctifs qui participent au processus de ritualisation de la pratique. Un habit de lumières est composé de plusieurs pièces, dont les trois principales sont réalisées en soie ornée de cannetille : la veste (chaquetilla), dont l’épaisseur et la rigidité offrent une relative protection au corps du torero (sans pour autant le préserver des coups de cornes), le gilet et la culotte (taleguilla). Ce costume est complété par une chemise blanche, une cravate (pañoleta), une large ceinture en soie, et deux paires de bas superposées. Les toreros à pied portent également des chaussures légères, généralement noires, une coiffe spécifique (montera), traditionnellement en astrakan et un chignon postiche (coleta) attaché à leur chevelure au haut de la nuque. Il est d’usage que, parmi les toreros, seul le matador porte un habit brodé d’or (ou de laiton), cependant que les autres membres de la cuadrilla placés sous son autorité sont revêtus d’habits brodés de cannetille en argent, de couleur noire ou blanche.
Cette chaquetilla a été taillée sur mesure pour Christian Romero, remarquable banderillero arlésien, qui l’inaugura lors de l’alternative (corrida d’investiture) du célèbre matador Jesulín de Ubrique, dont il était alors membre de la cuadrilla.
- Sirène de manège
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Friedrich Heyn (1849-1928) est considéré comme le sculpteur fondateur de l'école allemande des arts forains. Après avoir commencé par sculpter seul des sujets de manèges, et tout particulièrement des chevaux, son talent fut rapidement reconnu. Pour produire des manèges complets, du plus simple au plus complexe, il sut développer brillamment ses ateliers et, à son apogée, sa manufacture installée à Neustadt sur Orla (Thuringe, Allemagne) a employé jusqu'à cent personnes. Ses manèges et ses sujets sont connus dans l’Europe entière. Bien au-delà des arts forains, son talent d’artiste sculpteur est unanimement reconnu, tant pour la finesse de ses réalisations que pour la qualité de ses mises en couleurs.
Cette sirène est un sujet de manège sauteur, c’est-à-dire d’un manège dont les sujets montent et descendent de manière régulière. Elle fait partie d’une série de six pièces de sujets siréniens de Friedrich Heyn conservées dans les collections du Mucem provenant de manèges qui tournaient en Île-de-France au siècle dernier.