Livre - Clarinettes et anciennes danses du Trégor

Le 21 août 1895, J. Jacob écrivait dans la revue Le Nouvelliste Breton : " Chez nous, dans le pays de Tréguier, il n'y a guère que des clarinettes en buis, des vielles et des violons pour faire danser aux assemblées. " Il regrettait par-là l'absence, dans cette partie de la Bretagne, de biniou et de bombarde, instruments considérés alors comme " nationaux ". En effet, on ne les voyait guère qu'à l'occasion de fêtes exceptionnelles où des municipalités importantes, comme Lannion ou Tréguier, pouvaient faire venir, à grand frais, un couple de sonneurs de Cornouaille. En cette fin de XIXème siècle donc, avant l'invasion imminente des accordéons diatoniques qui bouleversera le paysage musical, les trois instruments les plus populaires en Trégor sont bien la clarinette, la vielle et le violon. Mais encore convient-il d'apporter quelques nuances à l'affirmation de J. Jacob. Tout d'abord, la pratique de la vielle, confinée au pays de Morlaix et à la " presqu'île " (c'est-à-dire la région de Pleubian-Lézardrieux) au début du XIXème siècle, est en déclin rapide depuis 1850. Le dernier vielleux de la presqu'île sera, selon le témoignage de J. Priel, un aveugle, mendiant à Plouguiel vers 1896. Quant aux joueurs de vielle de la région de Morlaix, on n'aura plus guère l'occasion de les entendre au-delà de cette date. Une photographie prise en 1902, nous montre l'un de ces derniers musiciens, très âgé, jouant de la vielle lors d'un mariage à Plourin-Lès-Morlaix. D'autre part, violons et clarinettes (…) se partagent le territoire de façon homogène et le domaine de l'un n'empiète qu'exceptionnellement sur celui de l'autre. Bernard Lasbleiz - livret/K7 : "Clarinettes et anciennes danses du Trégor" - Ed. Dastum 1991