Livre - Jeux de force et d'adresse

Jouer n’est pas le propre de l’homme : nombreuses sont les espèces animales dont les individus se livrent au jeu. Mais renouveler les moyens, les buts, la matière même des jeux, en faire varier les types et la fonction dans la diversité des sociétés, voilà qui est humain, voilà qui signe et qui marque une activité spécifiquement culturelle. Jeux de divertissement et jeux verbaux, jeux de force et jeux d’adresse, jeux de hasard et jeux de stratégie : combien de variétés ne faudrait-il pas distinguer si l’on voulait faire une classification générale des jeux ? Il faut prendre parti : dresser l’inventaire de toutes les formes d’activité ludique, y compris les plus verbales ; ou bien détailler celles des catégories de jeux où l’outillage et la technique sont prédominantes, de jeux, par conséquent, qui mettent d’abord en œuvre la force et l’adresse. C’est cette seconde solution qu’on a choisie pour la galerie d’étude. Voici donc la lance du jouteur et la massue du chevalier ; voici l’arc et l’arbalète, l’arquebuse, la sarbacane et le javelot ; voici la choule, le ballon, la balle, la bille, le chistera, la quille, la crosse et le maillet. Et par ces objets, voici mille questions : quelles fonctions nouvelles des jeux traditionnels comme les tirs remplissent-ils dans notre société, maintenant que les exercices guerriers auxquels ils étaient associés appartiennent au passé de notre culture ? Quels modèles et quelles sources de renouvellement des jeux comme la crosse, le follet ou le tzan offrent-ils à des morts rigidement codifiés comme le hockey ou le golf ? Et que signifient les progrès de la codification des règles quand ils s’appliquent à l’activité humaine la plus gratuite, jouer ? Jean CUISENIER